L’historique de l’hôtel
La région bien pourvue en lacs, rivières et forêts, royaume de la pêche et de la chasse, attire les amis américains des Wheeler et les anglophones de Montréal. Ces visiteurs se concentrent d’abord pendant la saison estivale. Puis, très bientôt, l’auberge ouvre aussi ses portes durant la saison froide, il est le premier établissement laurentien à prendre cette initiative, et la diversité des activités emballe ses clients. Ils peuvent en effet profiter du plein air toute la journée : excursions en raquettes, tours de traîneaux à chiens, glissades époustouflantes, patins et hockey à la grande patinoire sur le lac. Les plus hardis explorent déjà ces nouveautés scandinaves appelées « skis ». D’ailleurs, dès l’année 1920, les premières pentes de ski s’ajoutent à l’éventail des divertissements comme s’est ajouté un golf à l’été précédent et le possible accès à l’auberge ou aux territoires de chasse et pêche, par avion. À l’aube des années 1930, l’attrait des montagnes garantit d’ailleurs un essor formidable au tourisme hivernal, le ski de fond dont plusieurs tracés sont initiés par nul autre qu’Herman Smith-Johannsen (Jack Rabbit) et le ski de piste à Gray Rocks, entre autres, canalisent les villégiateurs.
Les propriétaires et dirigeants de cet hôtel sont constamment à l’affût d’une innovation pour améliorer leur entreprise. D’abord sur la montagne, leçons de ski, 1932, remonte-pente (câble), 1934, école de ski, 1938, T-Bar, 1944 et finalement, en 1950 et 1951, en même temps que l’ingénieuse idée des « ski weeks » se concrétise, l’installation du premier télésiège. Ces forfaits « tout compris » créent un tel engouement que les clients affluent… et exacerbent les inquiétudes de Harry quant au risque d’incendie surtout la nuit. Il n’est pas rare qu’il veille jusqu’au petit matin pour s’assurer que tout va bien. Quel soulagement pour lui lorsque des gicleurs sont installés au moment de la rénovation et de l’agrandissement de l’hôtel en 1955-56. Il peut désormais dormir l’esprit tranquille et continuer de rêver à d’autres projets.
Quant à l’aîné Tom, il se consacre, depuis 1942, à sa compagnie d’aviation Wheeler Air Lines, et aussi avec sa sœur Frances Ellen, à la gestion du Lac Ouimet Club (Le Château). C’est un club très sélect où politiciens et riches hommes d’affaire séjournent incluant l’accès à des territoires de chasse et pêche du grand Nord desservis par les avions de Tom. Même si les deux branches se développent en parallèle, leur complémentarité leur est bénéfique.
Au cours des années 1960, les rênes de l’établissement passent graduellement à la troisième génération, Harry Roberts (Biff) et Frederick Haskel (Tom Jr) se répartissent la direction, le marketing et l’administration générale, ils gèrent les opérations aidés de Basil Brewer. En 1970, Biff et Tom Jr acquièrent les parts de Tom Sr et de grand-mère Lucile et ajoutent celles de Frances Ellen, en 1976. C’est la première fois depuis la mort de George en 1926 que le domaine familial n’appartient qu’à deux personnes, les fils de Harry.
En 1982, Tom Jr part un golf aux Bermudes et Biff rachète ses parts avec l’aide de la Banque de Montréal. Onze ans plus tard, le domaine est vendu en dehors de la famille, à Philippe Robinson, déjà propriétaire du Mont-Blanc, et à Daniel Cordier, actionnaire minoritaire. Ces propriétaires investissent dans l’infrastructure, agrandissent l’hôtel, ajoutent un spa, transforment certains espaces en condos, installent un télésiège quadruple et construisent un nouveau golf, La Bête.
En 2006 sont soulignés les CENT ans de l’hôtel mais de multiples facteurs de conjonctures économiques et autres ont finalement raison de cette légendaire institution en 2009.
1 Danielle Soucy, La vallée de la Diable, de la hache aux canons à neige. p. 153-154. Éditions du Peuplier, 1995.